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Ecrivain pas seulement public...

 Parce que j'aime écrire, parce que j'aime faire rêver les gens…

 

Vous trouverez dans ces pages quelques textes, poèmes ou extraits que j'ai écrits... Bonne lecture !

Poème d'avril 2024

Seul devant le monde
L'oiseau plane
Descendant de l'ombre
Sur ses ailes immenses

Dans la plaine intense
De verdure
Les tendres et les grasses
Fleurissent de couleurs

Sur les chaudes heures
Elle, la belle,
Aux balcons feuillus
S'enivre de frais

Jouant de ses raies
La lumière
Éclaire les jupes
Des talons aux joues

Bien après la boue
Dans le nid
La pie qui s'endort
Couvent ses brillants

En sacré printemps
Passager
Stravinsky s'invite
En une symphonie

Les notes qui rient
Jardinant
Emportent le silence
Du ciel azuré

Encore loin l'été
Cependant
Une envie se lève
De goûter à l'onde

Là-haut seul au monde
Plane oiseau
De ses immenses ailes
Attire le soleil

Anne-Flore
20/03/2024

Poème d'avril 2024

Texte de mars 2024 - Arrêt sur image

Arrêt sur image

 

Stop. Respire. Prends le temps d'admirer. Regarde. La beauté te coupe le souffle.

Elle te garde un instant dans le présent. Reste là. Admire. Silence. C'est blanc. Immense. Fini. A perte de vu : le brouillard blanc laiteux… L'inconnu à l'horizon... Le rien du tout cachant un monde habituellement si familier. Et, devant toi, avant la frontière de l'invisible, se dégage un coin de mystère. Le voile, en tombant, te révèle une autre nature. Blanche, délicate, fragile. Le végétal recouvert de givre. Le minéral recouvert de gel. Les branches des arbres sont devenues de délicats motifs géométriques sur lesquels s'accrochent des tableaux d'araignées tisseuses. Les champs de verdures ont une teinte opaline lumineuse sous les marbrures de givre qui donnent aussi à la terre ses nuances mordorées de miel…

Tout est calme. Dans le froid du matin. Là. Immobile. Le vivant s'arrête un instant. Une minute volée à l'avenir sur laquelle le passé n'a pas de prise. Un moment éternel dans l'immobilisme du monde irréel. Entre brumes imprécises et gelées minutieuses, la nature nous appelle à la contemplation. Prendre un instant de respiration pour devenir immortel. Rester toujours dans le présent pour une minute. Que ta minute dure une heure ou une seconde : tu es là. Le soleil est absent et pourtant une lumière absolue, froide et intemporelle, sans ombre, révèle les alentours.

Seul au monde, un faucon pousse un cri, ses ailes blanchies par les lueurs de craie, passent au ralenti au-dessus de toi puis disparaissent du brouillard d'où elles sont apparues. Il est retourné dans la réalité après un tour vague dans ton intemporalité. Tes doigts s'engourdissent, tes joues rosissent, ta respiration te brûle et le froid qui t'envahit te force à faire un pas en avant. Un pas vers ton monde, un pas dans la réalité.

Tout s'estompe. Les brumes bougent, le monde commence à apparaitre au bout du chemin. Les araignées ont repris leur ouvrage, des gouttes de glaces tombent des branches… Ton éternité a disparu. Envolée par le mouvement de ta respiration profonde. Te voilà à nouveau dans la course, marchant sur le fil du présent, fuyant ou retenant le passé tour à tour, cherchant et ignorant le futur qui vient… Le monde dégèle, la vie reprend, elle est là dans le mouvement de vie, dans le mouvement du temps.

Anne-Flore
27/1/2022

Texte de mars 2024 - Arrêt sur image

Texte de février 2024 - La maison de la dame à mots

La maison de la dame à mots

Une douce odeur flotte dans l'air. L'air de rien. On y prête à peine attention… La maison est pleine. De souvenirs, d'objets inutiles, d'amitiés et d'idées… Des tasses chaudes, le thé est servi. La théière fume sur les coussins endormis. Le chat ronronne près de l'âtre éteint, les cœurs s'emballent dans des récits. Le miel coule dans l'eau chaude, le chat se blottit sur mes genoux. L'air est chargé de bienveillance.

Les gens écoutent, les amis entendent, les mains au chaud entourent les tisanes. Les mots filent sur le papier, le chat poursuit une ombre. Derrière les lettres d'encre, sous les lunettes attentives, la maison s'emplit d'images mentales, d'objets étranges et de tableaux de voyages. L'air douillet chatouille nos pensées.

Tristesse et joies se mêlent en aventures nouvelles et inconnues, au pays des ellipses et des non-dits. De métaphore en allégorie, les hyperboles chauffent les contrepèteries ; les assonances sonnent rondement ; les allitérations tapent frappent croquent et lapent. Tourne le matou sous la petite table.

Les mots migrent du papier aux sens. Le chat saute après sa queue. De soi à l’autre, de moi aux autres, en boomerang d’émotions partagées et choyées. A la fin du feu éteint, la maison déchargée, rechargée en clichés… Les sourires remplissent l'atmosphère. La chaleur aux joues des théières. Séparation resserrée, promesses des yeux profonds.
L’air de rien, La dame a ses mots, Le chat s'est endormi dans la douce maison.

Anne-Flore
27/01/2024

Texte de février 2024 - La maison de la dame à mots

Poème de janvier 2024

En ce mois de janvier,
Où l'année renouvelée
Pointe le bout de son nez,
Souhaitons à tous la santé,
Résolvons-nous à la paix,
Choisissons l'amitié
Et offrons au monde entier
Une très bonne année !

Anne-Flore
28/12/2023

Poème de janvier 2024

Bonne et heureuse année 2024

Mes voeux pour 2024, en vidéo !

Programme 2024 :
Amour en cascade,
Lecture et théâtre,
Nature en balade…
Sans oublier les
Moments privilégiés !
Encore une belle année
de bonheurs partagés
et d'amitiés comblées !

Anne-Flore
26/12/2023

Bonne et heureuse année 2024

Bonnes fêtes de fin d'année !

Bonnes fêtes de fin d'année !

La fin d'une année, quand l'hiver nait
Dans les bois dans les villes,
La nature immobile et les lumières qui brillent...
Nos yeux émerveillés, nos âmes élevées
Gardons nos cœurs au chaud et cultivons l'amitié.
Laissons partir l'ivraie de cette année passée !
Accueillons en chantant le nouvel an suivant !
Une promesse renouvelée, beaucoup de banquets partagés
Voyageons par les champs blancs, admirant le temps changeant...
Dans les bois dans les villes,
C'est l'hiver qui brille, la fin de l'année qui vacille...

Anne-Flore
15/12/2023

Poème de décembre 2023 - Matin de décembre

Poème de décembre 2023 - Matin de décembre

Matin de décembre

Ce matin, décembre
Ce matin, je vais bien
Sourire et froid
Mitaine et musique
Il est là
Décembre
Près de moi
Le froid arrive
Décembre
Reste là
Décembre peut attendre
Réchauffe-moi
Dehors
Décembre pare
La nature de givre et de froid
Des nuages
S'échappent de nos lèvres
Décembre peut attendre
Ce matin
Décembre est là
Tu es là
Décembre
Le froid
De nos mains
Qui s'échauffent
Décembre
Ne peut rien
Décembre
Ce matin
Décembre
Aujourd’hui
Décembre
Ne sait rien
De combien
Je t'aime
Décembre
Sera là
Ce soir
Quand tu verras
Combien je t'aime
Décembre
Ce matin
Qui m'attend
Dans le froid
De décembre
Avec toi
Sans attendre

Anne-Flore
01 12 2022

 

Poème de novembre 2023

La lune était pleine et la plaine était vide…
Nos cœurs enchaînés condamnés à errer,
Nos âmes immortelles écoutant désormais
A jamais mélodieuse, la voix des sacrifiés.
Les morts en disent bien plus longs sans un mot ;
Les pleurs font revenir ce qu'il y a de plus beau :
L'humanité désarmée prie la paix essoufflée
Et nos cœurs alourdis veillent sans un ennemi.
Voilà l'heure du jour, voilà l'heure de la nuit,
Où les tambours résonnent et saturent de bruit,
Les plaines vides de morts et la lune qui luit…

Anne-Flore
28/10/2023

Poème de novembre 2023

Trouille & Cie

Trouille & Cie

 

 

La lune sanglante flottait au-dessus de la ville endormie…

Endormie ? Pas tout à fait ; un détective rigolo, une tronçonneuse à la main, combattait un ver-de-terre dans un cimetière. Ce cimetière, silencieux froid et sombre, où sont enterrés moultes cadavres décomposés… La sorcière sanguinolente courait après le détective en hurlant une musique sombre et glauque, et mangeant des bonbons visqueux. Un vieux clown terrifiant arriva par derrière, souriant et triturant de ses doigts vils un enfant survivant. La tête de ce dernier, moitié tranchée, faisait apparaitre son cerveau réduit en marmelade. Alors qu’il agonisait, un squelette, une hache à la main, saccageait discrètement un mort. La peur gagnait la ville. La nuit gourmande sentait les esprits s’allonger sous la lune… Un fantôme cultivait tranquillement ses fémurs sous ses rayons. Trois chauves-souris machiavéliques le terrorisaient en hurlant autour de la tombe. Le fantôme téléphona à son esprit vivant. Prions pour que les hommes entendent la mort courir …

 

Atelier Trouille & Cie

Poème d'octobre 2023 - Passionnée

Passionnée

Je dois Ecrire

Ecrire pour se libérer du passé
Ecrire pour s'éveiller au présent
Ecrire pour créer l'avenir...

Je veux Ecrire

Ecrire pour apprendre à partager
Ecrire pour faire rêver les gens
Ecrire pour donner à réfléchir

Je peux Ecrire

Ecrire pour combattre sans épée
Ecrire pour vivre dans l'instant
Ecrire pour vendre du plaisir

J'aime Ecrire

Ecrire pour donner et encore donner
Ecrire pour toucher les dieux et les vents
Ecrire pour la Terre, en tous sens, parcourir

Je dois, je veux
J'aime et je peux

Ecrire comme respirer
Parce que c'est inné

Ecrire c'est ma nature profonde
C'est mon univers mon monde

Ecrire pour tout partager
Ecrire parce que passionnée !


Anne-Flore

Poème d'octobre 2023 - Passionnée

Poème de septembre 2023 - Lion de pierre

Poème de septembre 2023 - Lion de pierre

Lion de pierre

Il se cache
Il épie
Les passants, les venants…
Il est là, posé
Tranquille et inquiétant
Immobile
On le voit
Si l'attention est là.
Il se noie,
Dans les herbes hautes et les lilas.
Lui le roi,
D'une entrée désormais désertée,
Lui le gardien,
D'une maison abandonnée.
Pourtant toujours là,
Surveillant les manants.
Sa stature, sa prestance
Patinées par le charme des années
Par la nature et sa verdure
Par le reflet du ciel dans son allure.
Assis, il se tient
Sur le bord du chemin
Invitant à le passer
Sans s'arrêter.
Le regard toujours posé,
Majestueusement immortalisé
Dans la pierre devenu l'écrin
Du lion qui git sur le chemin.

Anne-Flore
25/08/2023

Poème d'août 2023 - Nymphe au bois

Nymphe au bois

La nymphe au bois
Les feuilles pour abris
Les ombres pour habits
Se prélasse sans voix
Puis,
Sortant la nuit
Elle danse chante
Envoûte et enchante
Et jamais ne fuit
Amours ni ennuis

Anne-Flore
27/07/2023

Poème d'août 2023 - Nymphe au bois

Petite poésie de juillet

Petite poésie de juillet

 

Petite poésie de juillet
Chaude comme un soleil d'été
Toute douce comme un nuage de lait
Petite poésie de juillet
Vient caresser
Nos pensées...
Anne-Flore

Après l'orage

Matin, filins,
Lendemain d'orage

Odeur de pluie
Le soleil réchauffe les endormis
Le port au calme s'est assoupi…
Mais dans l'air léger
S'entend dehors
De la nuit passée
Le vent qui a soufflé.
Les bois craquent
Les coques grondent encore

Malgré les vagues
Ramenant du large
La douce plénitude profonde
Sérénité des ondes…
Les mâts se remettent doucement
Les mâts se remettent doucement
Les filins expriment en cliquetant

Bruits de cordes et de métal
L'orage renversant l'étal.
Au loin les mouettes et goélands
Piaillent en cœur, acclamant
Pitance et retour du beau temps !
Le port doucement assoupi

Le soleil réchauffant l'eau endormie
Odeur d'après pluie
Matin d'après rage
Lendemain, la fin

Anne-Flore
15 05 2022

Après l'orage

Monsieur Auxances

Monsieur Auxances

Il a toujours habité là…. Le long de l'eau. Enfin depuis qu'il est marié. Ici c'est toute sa vie, au bord de la rivière. Il y a vu grandir ses enfants, il a travaillé dur, il a vu sa femme vieillir, puis mourir… Ses enfants étaient déjà partis, depuis longtemps, loin du cours de l'eau. Parfois il a de leurs nouvelles… des petits enfants à l'autre bout du pays. Pourquoi ils sont partis si loin ? Ils ont fait leur vie. Ils ont l'air heureux. Sa femme était triste, cherchait sans arrêt une excuse pour les appeler, leur demander de passer, aller les voir… Ils ont pris le train quelques fois pour passer du temps loin des rives coutumières, au milieu d'une famille dans laquelle il ne se sentait pas vraiment chez lui. Il n'a jamais été très loquace. Il n'avait pas besoin, son Yvette parlait pour lui. Cela faisait toujours rire les enfants, les riverains : elle disait "votre père pense…" et même "votre père m'a dit…" et jusqu'à "votre père y dit…"

Mais lui était d'accord, pas besoin de parler avec Yvette, elle savait ce qu'il avait dans la tête, connaissait sa façon de penser, d'agir. Elle parlait pour lui, mieux qu'il l'aurait fait, elle organisait ses pensées comme personne. C'est pour ça que le temps n'avait pas d'importance auprès de son Yvette, le long de l'eau. Ils se connaissaient trop bien. Et puis elle est partie. Il est resté seul. Dans sa grande maison au bord de l'Auxances. Où il avait toujours vécu. Il est encore là, aujourd’hui, près de sa rivière. Il vit au milieu des souvenirs, il l'entend parfois rire quand il se fait à manger. Ben oui, il a fallu apprendre les gestes du quotidien… Il les connaissait par cœur, pour avoir vu son Yvette pendant tant d'années à ses côtés, au bord de l'eau. Elle savait faire de bons petits plats, s'occuper du ménage, des lessives, garder contact avec la famille, les amis… Il a du tout faire lui-même. Enfin… Ses enfants n'ont pas eu besoin d'insister beaucoup pour qu'il prenne une femme de ménage. Ana n'est pas la plus jolie fille du monde, mais elle est bien brave et s'acquitte sans broncher, sans attendre de conversation de sa part, du ménage dans la maison et même des corvées de linge de temps en temps. Il n'en voulait pas au départ parce qu'il est de la vieille école. Lui il avait accueilli, quand ses enfants étaient encore petits, sa propre mère, à la mort de son père, jusqu'à ce que son état se dégrade et qu'elle finisse ses jours en maison de repos. Alors il avait pensé que ses enfants l'accueilleraient chez eux. A vrai dire il était partagé : être une charge pour ses enfants, quitter sa maison, son Auxances… Ça n'avait rien de drôle. Alors finalement, Ana était le bon compromis. Mais se faire à manger. Il avait cru que c'était facile. Yvette le faisait avec une telle aisance ! Les premiers œufs sur le plat s'étaient transformés en œufs brouillés… Il avait réussi à éviter d'y laisser des morceaux de coquilles… Cette fois-là ! Alors maintenant, quand il se faisait à manger, il imaginait son Yvette qui lui donnait ses conseils, le regardait d'un œil un peu critique, mais surtout amusé. Et puis il n'avait pas l'idée d'appeler ses enfants, tant qu'il n'avait pas besoin d'eux, pourquoi les appeler ? Et quand il voulait de leurs nouvelles, il reprenait les vieilles photos de famille, les jours heureux passés le long de la rivière. Il n'aimait pas parler au téléphone de toute façon. Alors ses enfants ont commencé à appeler moins souvent, à venir moins souvent… Et depuis que son cadet avait des jumeaux, il ne le voyait plus. Sa vie était là, près de l'eau. Elle avait toujours été là. Au bord de la rivière. Il la connaissait bien son Auxances. Déjà, jeune marié, il allait, chaque jeudi soir avec ses collègues au bar, celui de la rive droite, pour discuter, passer le temps, jouer à la belote. Pour rentrer, il traversait la route, longeait la rivière, en faisant, parfois, plus de zigzagues qu'elle et rentrait le plus doucement possible à des heures impossibles. Aujourd’hui, le jeudi soir il continuait à retrouver ses copains au café de l'autre côté de la route… Et il participait à des tournois de belote. Il ne travaillait plus, n'avait plus personne qui l'attendait, il pouvait boire tout son saoule, mais cela ne l'intéressait pas. Il passait parfois plusieurs soirs par semaine au café de la rive droite, pour jouer avec les copains. Les copains… Eux aussi, il en avait vu passer. Certains étaient partis pour des raisons professionnelles, d'autres pour des raisons personnelles, des divorces, des naissances… Et puis il y avait tous ceux qui étaient morts. Il faut bien l'avouer, à partir d'un certain âge on assiste à plus d'enterrements que de mariages. Même au bord de l'eau. Mais ces dernières années, ça devenait une tragédie. Des copains, des voisins, il s'en faisait facilement : il écoutait les autres, ça lui évitait de parler. Et puis son sourire bienveillant lui valait fréquemment le surnom de "bonhomme". Mais il avait beau se faire de nouveaux amis, ils étaient de moins en moins nombreux aux tournois de belote. La rivière, elle, continuait de couler et de l'accompagner, à chaque fois qu'il rentrait chez lui. Pas trop tard. Il avait du mal à voir quand il faisait noir… et son pied était moins sûr, il avait peur de se casser quelque chose. A son âge on ne s'en remet pas comme à 20 ans !

L'hiver c'était la saison triste : les arbres étaient nus, les herbes folles prenaient des teintes marronnées, il voyait mieux la rivière… mais parfois d'un peu trop près quand elle débordait sur sa petite route. Quand il a emménagé, il a tout de suite compris que si près de l'eau, il risquait les inondations, aussi il avait construit sa maison de l'autre côté de la route, sur le petit coteau. Il aurait pu, comme certains de ses voisins, décaisser pour mettre sa maison, sans marche, au bord de la route. Il avait préféré remblayer, il avait monté un mur de plus de 2 mètres de haut et avait construit sa maison sur la hauteur. De la route, personne ne pouvait la voir, cachée derrière les arbres, même sans feuille. Il avait un petit bout de potager de l'autre côté de la route, au bord de l'eau, où la terre fertile donnait de bons légumes. Il avait encore la force de l'entretenir, même s'il plantait de moins en moins de patates ou d'haricots, trop difficiles à ramasser. Alors quand la rivière sortait de son lit pour fertiliser allègrement son potager, il était peut-être coupé du monde, mais il avait les pieds au sec. Deux à trois fois par semaine, il se rendait à la superette de la commune, de l'autre côté, rive gauche. Au début il n'avait pas de problème à y aller à pieds, mais depuis quelques temps, il préférait aller à l'arrêt de bus, payer en monnaie son billet et s'arrêter trois arrêts plus loin, avec son cabas. Puis, une fois plein, il revenait chez lui par le bus, payant son ticket en monnaie, toujours. Il avait beau faire et refaire le chemin, le long de sa route, de chez lui, jusqu'à l'arrêt de bus, à 200 mètres, à chaque fois elle était différente. A chaque fois il découvrait de nouvelles ondulations, de nouveaux reflets… Il avait beau connaître par cœur les arbres alentours, leur cime dénudée en ce milieu d'hiver, la lune pas encore pleine au-dessus, veillant depuis le ciel… La lune qui lui rappelait toujours son Yvette. La rivière, elle, changeait tout le temps. Aujourd’hui particulièrement, comme tous les jours où le soleil froid daignait apporter un peu d'enthousiasme à la journée… L'astre solaire aimait jouer à cache-cache avec les arbres. Ses reflets touchant l'onde selon l'angle des branches mortes qui accrochaient les rayons. Chaque fois, il s'étonnait des nouvelles branches qui étaient tombées, avaient formé un barrage ici, s'étaient débloquées là… Chaque fois il s'émerveillait d'entendre le bruit de l'onde qui glapissait entre les brindilles, qui sautait par-dessus les obstacles, qui grouillait un temps dans les barrages éphémères avant de s'échapper vers l'aval. Et tout autour, les oiseaux chantaient, gazouillaient, piaillaient, accompagnant l'éclaircie bienvenue de ce milieu d'hiver. Il aimait quand il y avait du soleil, surtout en ce moment, où il ne voyait plus beaucoup de monde. Il aimait observer les gens qui marchaient le long de l'onde. Alors dès les premiers rayons du soleil d'après-midi, au lieu d'aller faire la sieste comme la plupart de ses copains, il descendait dans son jardin, jusqu'au mur d'où il dépassait les piétons d'un bon mètre. De loin, ceux qui levaient un peu la tête, ne voyait dépasser qu'un dos, une casquette bleue. Quand on apercevait son visage, il avait accroché son sourire bienveillant. Il observait, les passants : des couples de vieux amoureux, qui se tenaient par la main ; des familles bruyantes, les parents suivant des vélos, des trottinettes ou toute sorte d'engins qui faisaient avancer les petits ; des cyclistes qui filaient sur la route plate ; des adolescents, en bande, qui riaient et parlaient une langue qui lui était inconnue ; des marcheurs qui avançaient avec deux cannes et allaient deux fois plus vite, vers où ? Aucun ne paraissait s'intéresser à l'eau qui les accompagnait. Il ne pouvait s'empêcher de se demander s'ils la voyaient, s'ils l'entendaient, s'ils la ressentaient couler, avancer, rire, rouler, souffrir, vivre au rythme de leurs pas… Lui restait là, au bord de l'Auxances, sa casquette bleue dépassant le mur pendant qu'il regardaient les passants, en compagnie de sa rivière…

Anne-Flore
Le 12 02 2022 … Au Bonhomme le long de l'Auxances dont la casquette bleue dépasse du haut de son mur…

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